Sécuriser le cycle de développement applicatif
À l'ère du "tout numérique", l'augmentation de la production de logiciels par des entreprises de tout type élargit d'autant la surface d'attaque potentielle, faisant de la sécurité des applications une priorité absolue. Pour trouver un équilibre entre vitesse et sécurité, les organisations doivent se tourner vers les pratiques DevSecOps. Adapter cette approche, c’est éviter les mauvaises surprises en déploiement et en production, nous explique Tom Leclerc, Head Of Innovation & Software solutions chez Telindus.
Pourquoi est-il important de sécuriser l'ensemble du cycle de développement logiciel ?
"L'une des principales raisons est d'éviter les omissions critiques dès le début du processus. Un exemple illustrant cette nécessité est la certi- fication vis-à-vis d'une norme de sécurité ou d’une certification ISO. Souvent, la tentation est de repor- ter la certification à la phase finale, une fois que le produit est achevé. Cependant, ce choix peut s'avérer problématique, car des éléments importants qui auraient dû être pensés et mis en place tout au long du développement peuvent être omis. Ainsi, pour garantir une certification réussie, il est essentiel de l'aborder en amont, dès les premières étapes".
"L'analyse des risques revêt une importance primordiale. Prendre en compte les risques ne se limite pas à une question de sécurité, mais englobe également la gestion budgétaire associée. Cela suppose d'impliquer toutes les parties prenantes pertinentes, notamment celles ayant un rôle financier dans le projet. Gérer les risques consiste à allouer les ressources adéquates aux aspects les plus critiques du développement, tout en reconnaissant que certains problèmes pourraient ne pas être résolus en raison de contraintes budgétaires. L'analyse des risques agit comme un fil conducteur tout au long du développement, en définissant les besoins en termes de sécurité et en influençant les décisions de conception. Cette approche peut également guider dans les fonctionnalités qui seront intégrées ou exclues en fonction de leur coût et de leur niveau de risque associé".
"De plus, à mesure que le cycle de vie du logiciel progresse, d'autres aspects doivent être pris en compte. Par exemple, lors du décommissionnement d'un logiciel en fin de vie, il est essentiel de mettre en place des mesures pour effacer les données, gérer les archives et prévoir le stockage sécurisé de données essentielles pour de futures utilisations".
"En somme, bien que sécuriser l'ensemble du cycle de développement logiciel puisse sembler complexe, cela se révèle être une démarche essentielle pour garantir la conformité, la qualité et la sécurité du produit final. Chaque étape du processus doit être soigneusement envisagée et traitée, même si certaines questions peuvent sembler évidentes, car une réponse adéquate à chaque questionnement contribue à la solidité globale du logiciel".
Qu'apporte le modèle DEVCOPS et quel rôle joue l'automatisation ?
"Le modèle DevSecOps apporte une synergie entre développement, opérations et sécurité au sein du processus de développement logiciel. L'automatisation y joue également un rôle important".
"Le DevOps, en pratique, implique souvent une automatisation étendue, bien que cela ne soit pas strictement obligatoire. Le concept sous-jacent à DevOps réside dans la collaboration optimale entre les développeurs et les opérations, auquel s'ajoute la sécurité dans le cas du DevSecOps. L'objectif est d'orchestrer ces trois composantes de manière harmonieuse, ce qui se traduit par une agilité accrue et des cycles de mises à jour plus rapides".
"En particulier, l'automatisation joue un rôle essentiel en permettant une collaboration fluide entre des équipes ayant des tâches et des besoins divergents, ainsi que des cycles de vie distincts. Elle contribue à clarifier les rôles entre les équipes de développement et d'opérations. L'automatisation aide également à aborder les problèmes de sécurité en introduisant des vérifications systématiques à chaque étape du processus, du développement à l'exploitation. Ces vérifications incluent l'exécution de tests unitaires fonctionnels et de sécurité, de pentests et d'autres procédures automatisées ou non, permettant d'identifier les failles potentielles et d'assurer la conformité".
"L'émergence de l'Infrastructure-as-Code (IaC) a débloqué la synergie entre le développement et les opérations. Grâce à cette approche, les procédures sont codées, ce qui facilite l'ajout de mesures de sécurité. On peut ainsi s'assurer que le code et l'infrastructure demeurent cohérents entre les versions, et que les règles de sécurité sont respectées. Cette automatisation aide à prévenir les erreurs humaines et assure la mise en place continue de mesures de sécurité.
La plupart des applications modernes reposent sur des API pour interagir avec d'autres logiciels.
Quels risques le recours accru aux API fait-il courir aux entreprises ? Comment peut-on s'en prémunir ?
"Le recours accru aux API peut exposer des processus internes, précédemment limités au système d’exploitation, à des communications réseau ouvertes sur l’extérieur. Cela pourrait permettre des intrusions et des interactions non autorisées avec des parties antérieurement inaccessibles. De plus, la transition vers les API peut entraîner des pertes d'informations sur les types de données et de possibles erreurs de traitement".
"Le recours aux API introduit des avantages, tels que la ségrégation des fonctions et la redondance pour une meilleure résilience. Cependant, ces avantages doivent être abordés en tenant compte du contexte spécifique de chaque logiciel. Des outils comme Docker ou Kubernetes constituent de bons choix en général mais leur utilité dépend du cas d'utilisation".
Qu'apporte une approche proactive comme la scurity by design et quels en sont les bénéfices ?
"Pour se prémunir de ces risques, le Security by Design est crucial. En implémentant la sécurité dès le début, les problèmes futurs sont anticipés et les coûts associés à une implémentation tardive de la sécurité sont évités. Les tests de sécurité, comme les pentests, sont également essentiels, mais doivent être effectués tôt dans le cycle de développement pour identifier les failles potentielles avant l'intégration complète".
A quels défis les organisations qui désirent sécuriser d'avantage leurs développements applicatifs doivent-elles s'attendre ?
" La sécurité implique un coût substantiel, sans apporter de gains immédiats en termes de rapidité ou de fonctionnalités améliorées. Au contraire, elle peut rendre la gestion plus complexe et ralentir le développement. Il faut considérer la sécurité comme un investissement similaire à une assurance, où l'efficacité est souvent indiscernable tant que tout fonctionne bien".
"Le bon démarrage du processus est capital pour le succès du projet. Une fois que les rôles et responsabilités sont clairs, et que les bonnes pratiques sont établies, la plupart des défis peuvent être gérés efficacement. Il est indispensable d'organiser les équipes de manière cohérente dès le départ, en intégrant dès les premières étapes du développement les exigences de sécurité, la gestion des licences, ainsi que la conformité à des réglementations comme le RGPD. L'équilibre entre la tarification et la protection des données du client est un exemple de la complexité rencontrée. La mise en place des bonnes pratiques est essentielle pour établir un cadre solide".